Organisée par lʼintersyndicale SNES-SNALC-CGT et soutenue par la FADBEN, cette
journée a rassemblé près de 70 professeurs documentalistes de toute lʼacadémie, au
lycée du Parc Impérial à Nice. Cette initiative était une première du genre en France et le
nombre de participants montre quʼelle répondait à un véritable besoin dans la profession.
Réflexion et échanges se sont poursuivis devant le Rectorat, où 25 collègues se sont
ensuite rassemblé(e)s pour soutenir la délégation SNES-SNALC-CGT-UNSA-FADBEN qui
était reçue sur la situation des professeurs documentalistes. Là encore, une preuve de la
volonté de mobilisation des collègues !
La matinée sʼest ouverte par lʼintroduction de Jean-Charles Zurfluh pour le SNALC, Laure
Boushor pour la CGT et Corinne Gioanni pour le SNES. Chacun a exposé la vision des
différents syndicats sur le métier de professeur documentaliste. Des convergences se
dessinent : considérer lʼenseignement de lʼinformation-documentation au cœur du métier
et défendre la qualification des enseignants documentalistes. Corinne Gioanni a montré
que sous couvert de ne pas afficher une réforme directe du métier, lʼInspection Générale
et le Ministère parlent de réforme de structure, soit de transformation des CDI en Learning
Center. Elle a rappelé que le SNES sʼétait battu pour la circulaire de missions de 1986 et
le CAPES en 1989 et que depuis, notre syndicat nʼavait jamais cessé de défendre les
fonctions pédagogiques du professeur documentaliste, la nécessité dʼune reconnaissance
de la didactique disciplinaire, jusquʼau dernier congrès du SNES : « Lʼenseignement de
lʼinformation documentation en interdisciplinarité doit être conforté sous la forme dʼun
curriculum de la Sixième à la Terminale, dont le professeur documentaliste a la
responsabilité : la transmission des notions et compétences info-documentaires lui revient
tandis quʼun enseignant dʼune autre discipline peut, dans ce cadre, travailler un objet de
son programme. » (Congrès de Reims, avril 2012). La demande dʼune agrégation pour les
professeurs documentalistes par lʼensemble des syndicats de la FSU concernés a
également été rappelée.
Karine Mertens et Patricia Basin-Ecalle du bureau académique de la Fadben ont ensuite
présenté les résultats du questionnaire rempli par 128 professeurs documentalistes de
lʼacadémie, soit plus de 1 sur 2. Ils font ressortir que les collègues restent attaché(e)s à la
double facette de leur métier, pédagogie et gestion. Les missions qui arrivent en tête par
ordre dʼimportance sont ainsi : gestion documentaire / incitation à la lecture / formation à la
recherche sur Internet / formation à la recherche sur logiciel documentaire / animation
culturelle. La fonction de gestionnaire de réseau arrive bonne dernière, nʼen déplaise à ce
que souhaiterait lʼInspection Générale pour le devenir des professeurs documentalistes !
Dʼautre part, une très large majorité des collègues (78 %) souhaitent que les contenus
dʼenseignement dʼinformation-documentation soient formalisés ; ce qui est lʼune des
revendications phares du SNES est donc aujourdʼhui très largement partagé. Autre
revendication de notre syndicat qui emporte une adhésion quasi-unanime, celle de
lʼagrégation (approuvée à 85%).
Claire Richet (académie de Nantes), représentante du groupe documentation avec
Virginie Pays (académie de Lyon) et Vassilia Margaria (académie de Nice) est ensuite
intervenue pour faire le point sur lʼaction du SNES concernant les professeurs
documentalistes au niveau national. Elle a rappelé les discussions de lʼintersyndicale et de
la FADBEN avec le Ministère sur les missions des professeurs documentalistes et
dénoncé le double jeu de la DGESCO qui a voulu publier un projet de texte, en
contradiction avec le travail qui avait été fourni. Le SNES a mené la bataille pour mobiliser
la profession contre ce projet et a réussi à faire reculer le Ministère. A ce jour, le seul texte officiel qui cadre les missions des professeurs documentalistes reste donc la circulaire de
1986, la boulimie de publication de lʼIG (Protocole dʼInspection, PACIFI, etc.) nʼy
changeant rien !
Claire Richet a également insisté sur le fait que pour le SNES, la défense des missions
pédagogiques du professeur documentaliste est intimement liée à celle des postes et à la
réduction du temps de service. La revendication dʼun plan pluri-annuel de recrutement
pour atteindre lʼobjectif dʼ1 professeur documentaliste pour 300 élèves sera donc portée
fortement par le SNES dans les discussions qui pourront sʼouvrir avec le futur
gouvernement.
Claire Richet a également évoqué les différents contentieux statutaires (agrégation,
paiement des heures supplémentaires, aides-documentalistes, etc.) et elle a fait le point
sur la question de la rémunération des collègues intervenant dans le cadre de la
formation. Ils rencontrent des difficultés pour être rémunérés depuis la disparition du
décret de 1956 permettant le paiement de certaines vacations. Pour en savoir plus,
contactez le secteur rémunérations du SNES : [email protected]
Enfin, elle a présenté les publications à venir : un article pour le numéro de juillet-août
dʼIntercdi consacré à lʼidentité professionnelle ainsi quʼune publication électronique, dont
la publication est imminente « Professeur documentaliste : itinéraire dʼun métier militant ».
Elle analyse la situation des professeurs documentalistes, met en relief les obstacles
auxquels ils se heurtent mais aussi leurs réussites, et trace des perspectives dʼavenir en
précisant les revendications du SNES sur le métier.
La matinée sʼest terminée avec un point sur la formation initiale des professeurs
documentalistes par Dominique Chabant (SNES) et Sylvie Puech (SNESUP). La
préparation au concours de professeur documentaliste, portée par l’IUFM depuis de
nombreuses années, est désormais intégrée à un master Lettres / Documentation dont
Mme Puech assure la responsabilité. Malgré les conditions désastreuses imposées par
une masterisation mise en œuvre dans la précipitation, ce parcours "documentaliste en
établissement scolaire" permet de dispenser une formation dans laquelle la spécificité
pédagogique des professeurs documentalistes a toute sa place. Sylvie Puech a aussi
insisté sur le fait que la revendication dʼune agrégation en information-documentation était
tout à fait légitime.
Les travaux ont repris l’après-midi avec une intervention de Françoise Chapron (ex
présidente de la Fadben, Maître de conférences en sciences de lʼéducation, ex-
Responsable à lʼIUFM de Rouen de la filière documentation et de la formation au CAPES
externe). Elle a brossé le tableau des luttes qui ont permis la reconnaissance de la
profession d’enseignant documentaliste.
Ce qui était au départ un métier, centré autour d’un certain nombre de tâches techniques,
a évolué vers une profession fondée sur des savoirs. Petit à petit, s’est opéré un
glissement de la pédagogie documentaire vers la culture de l’information, aujourd’hui
quatrième culture, selon F. Chapron, après les humanités, les sciences et l’économie.
L’enseignement de l’information-documentation répond à des enjeux essentiels quant à la
formation du jugement critique des futurs citoyens qui auront besoin d’être éduqués aux
médias, de comprendre comment une information se produit, se diffuse et de savoir
s’informer pour pouvoir se former tout au long de la vie.
Françoise Chapron a rappelé aussi comment, par ses interventions en tant que présidente
de la Fadben, elle a participé aux avancées qui ont permis à notre profession d’être
reconnue au sein de l’Ecole. Plus récemment, elle s’est opposée à l’Inspection Générale
qui tente d’imposer à marche forcée une transformation du cœur de notre métier. D’après
elle, si les ENT et autres Learning Center sont mis en avant, c’est parce qu’ils
représentent des marchés juteux à conquérir. Elle a rappelé que ce qui prime avant tout
pour nos élèves, c’est leur formation à une utilisation raisonnée des outils numériques. Les
missions pédagogiques des professeurs documentalistes doivent donc être confortées.
Elle considère que si le travail réclamé par les collègues sur la nature et la description des
missions des professeurs documentalistes doit être mené, il faut aussi penser les profils et
scénarios d’évolution de la profession et les inscrire dans un cadre global. Cela implique
que notre profession doit être pensée dans le cadre des missions générales , de
l’évolution du système éducatif et du travail d’équipe dans les établissements, en
complémentarité avec les autres tout en gardant ses spécificités, et en fonction des
besoins sociaux et scolaires des élèves. Et de conclure sur la nécessité pour la profession
de ne rien se laisser imposer, de se mobiliser et d’anticiper plutôt que de subir les
décisions institutionnelles !
Le temps de débat avec l’ensemble des collègues présents, a permis de dénoncer
certaines situations locales sur le terrain qui ont été dénoncées lors de l’audience. Il a été
l’occasion de poursuivre la réflexion sur les évolutions de notre métier, de se questionner
sur les besoins en terme de formation initiale et continue et sur les actions à mener pour
que nos revendications soient prises en compte par le prochain Ministère.
Compte-rendu réalisé par Vassilia MARGARIA, Responsable « Documentation » du SNES de Nice